• Tréfonds

     

    Tré fonds

     

    Commune de: Salignac -Eyvigues, DORDOGNE 24

    Coordonnées : 1° 18’ 33’’ E ; 44° 56’ 52’’ N

    Altitude : 160m

    Type de sol : Calcaire J4b Oxfordien.   

     

    Tré fonds

    Tré fonds

    L'entrée de la diaclase.

     

    # 26 Juillet 2007 : COLY Jérémy, DELPECH Thomas, NEUVILLE Alain, Voyou 

          Suite à une précédente rencontre, je retrouve Alain NEUVILLE devant la mairie de Salignac. Pas de temps à perdre direction le site des trois fonds, " Tréfonds " dans notre bon vieil Occitan. D'ailleurs cela veut dire les trois " vallées " et en observant la vue aérienne nous comprenons mieux pourquoi, pas bêtes les anciens !

        Nous voilà devant la station de pompage qui chapeaute le forage profond. Ce forage agricole permet l'irrigation des terres avoisinantes via un bassin de réserve. Une fois dans le bassin, une plaie béante est visible au bord du talus. La bâche et le film géotextile ayant étés mis en lambeaux.

         Un effondrement souterrain (supposé) a permis à l'eau de percer ce réceptacle artificiel afin de retourner virevolter au sein des bas-fonds de ce monde.

        C'est donc une ouverture de 2 mètres de diamètre et de 1 mètre de profondeur qui laisse lieu au plan d'eau.

         Mais cela demande quelques explications. M.COLY (et oui ça ne s'invente pas !) technicien maintenance de la station nous rejoint et me transmet quelques informations capitales. Le forage puise l'eau à -120m directement dans la nappe phréatique profonde. Voilà quelques années, il fallut remonter la pompe à la cote de -80 mètres car une quantité importante de sable (sidérolitique) remontait en même temps que le précieux liquide. Les sècheresses à répétions de ces trois dernières années conduisent à l'interruption du pompage, car en 2005 il n'y eut plus d'eau ! Le niveau étant descendu de 80 mètres ! (et oui le maïs ça boit !). Durant l'automne 2006 (étiage), la bâche cède sous le poids de l'eau en réserve et laisse apparaître une diaclase de 0.8 à 0.5 mètre de large sur 13 mètres de profondeur mesurées avec une corde. Le courant souterrain est visible depuis la surface même quand la pompe est à l'arrêt. Les pulsations du cœur s'accélèrent…et en un instant cette eau limpide vous appelle telle une sirène, " première, première ".

        Ce cas n'est pas exceptionnel, par exemple le réseau de Wakulla spring en Floride, qui a drainé les eaux d'un immense lac (lac Jackson) après effondrement du plafond d'une galerie sous-jacente. Mais bon la Floride c'est loin et le Périgord Noir m'appelle !

         La décision commune est prise de plonger pour poursuivre l'enquête et " surtout " d'observer le plafond afin de quantifier les possibilités de la remise en eau après consolidations.

     

    # 04 Août 2007 : COLY Jérémy et sa compagne, COUDERC Jean-Luc, CRUVEILLER Monique, DELPECH Thomas, HARIELLE Bruno, NEUVILLE Alain, O'YL Wilford, Gaya et Voyou 

         Ayant eu les autorisations nécessaires, le camp s'installe. Mise en place de la chèvre au-dessus du regard, préparation du bi 6l et des bouteilles de sécurité, mais encore caméra, appareils photo tout y est ! C'est l'attraction du jour!

    Tré fonds

    Tré fonds

    Les préparatifs.

        Je suis accueilli par un banc de gardons rescapés du déluge ! Je décide de partir dans un premier temps vers l'aval afin de préserver l'amont (courant). Le fil accroché, je pars en capelé (grosse erreur), les passages sont très serrés, la visibilité est passée de 5 mètres à 0.

    Tré fonds

         Une pluie de castine me tombe sur la tête, et ça coince dur ! Je me faufile au grès des creux et bombés des parois. La cote -7 mètres est atteinte. Je ne peux plus descendre ni avancer. Quoi faire ? Décapeler ! Je ne peux pas bouger et le fil d'Ariane semble tout mou. Je rembobine et retrouve une certaine "raideur rassurante" ! Je décide de remonter car je suis inquiet quant au fait de retrouver les passages empruntés lors de la descente. La remontée se déroule tant bien que mal et je perce la surface 6 minutes plus tard couvert d'argile et de castine (ça craint !).

         Petit compte rendu "séquence émotions", et décapelage pour espérer pénétrer l'amont qui est en partie obstrué. La marche arrière est de rigueur !

    Tré fonds

         Au bout de 5 à 6 mètres et -5 mètres, je bloque « grave » ! La position Égyptienne ne suffit plus (il faut vraiment que je me mette au régime !). Par contre, sous moi à 8 ou 10 mètres, le conduit s'élargit, dommage ! Une plongée en décapelé dans l'aval est à proscrire pour aujourd'hui car j'ai touillé l'amont et même avec le courant la turbidité n'est pas du tout raisonnable. De plus, il n'y a rien pour arrimer le fil à la descente !

        En résumé, le plafond est composé de castine et d'argile sur 2 mètres de chaque côté dans l'axe de la diaclase. Après notre bon vieux calcaire reprend ses droits. Je conseille donc de décaisser afin d'atteindre le rocher et créer une dalle reposant sur les bords, avant de recouvrir le tout. Bien sûr j'évoque la possibilité de buser et de créer un puits, non, non !

        Une fois de plus l'intelligence et le bon sens de nos géologues locaux firent la différence, "Il faut tout combler" ! Bien sur 40 ou 50 m 3 de rocher ce n'est pas cher et puis ça ne dénature pas le réseau noyé souterrain !!!

         Enfin, à ce jour (15/01/2009) rien n'est fait et je compte replonger sous peu dans l'aval mais cette fois à l'anglaise. Le but étant d'essayer de progresser dans la partie basse pour voir ! Et oui on ne sait jamais !?

         Encore merci à tous pour ce bon moment passé ensemble, il est d'ailleurs regrettable qu'aucune photo de groupe ne soit prise.

     

     # 23 Janvier 2009 : DELPECH Thomas, Voyou 

           Un jour ou l'autre, il faut bien finir le boulot. Et bien c'est pour aujourd'hui !

         Après mures réflexions sur la stratégie à adopter, je prépare le matériel. Ce sera donc à l'anglaise en mono 6 litres Nx 40/60 (ben oui il restait que ça !). Comme ligne de vie, une corde de 9mm devrait suffire au cas où il faudrait tirer un "peu" dessus !

          En arrivant, première surprise, le lac de retenu est remplit sur 0.8 mètre ! Ceci prouvant le travail de sape des crues / sècheresses à répétition. Avant toute forme d'exploration, je me dirige pour observer les trois sources périphériques. La première au milieu du champ sort du sol sous pression par de petits orifices. La seconde est suspendue au-dessus de la vallée à 4 ou 5 mètres environ. Un conduit d'une vingtaine de centimètres de diamètre permettant à l'eau de sortir avec un débit estimé à 10 l/s. La troisième en lisière de bois est la plus importante. Elle débite environ 25l/s et vaudrait la peine d'être désobstruée, car l'eau émerge entre des pierres.

         Je repars me préparer et me dirige vers le regard dans le lac. Il faut faire vite, car mes pas lèvent un voile de touille ! Je pose un madrier en travers de l'entrée et amarre la corde. J'allume les lampes et me jette littéralement à l'eau. Il faut que je descende rapidement dans la diaclase si je veux voir quelque chose. Tout se déroule au mieux et je comprends qu'en 2007 le passage était impossible en capelé. J'arrive à une étroiture et hésite à la tenter. Ce passage m'oblige à passer avec le casque de profil, mais je suis fier de moi intérieurement ! Comme prévu la section s'élargit un peu, mais je ne peux plus descendre. Je vous promets, je n'invente pas. J'ai passé la jambe droite dans une boucle formée par la corde !! Je force mais rien à faire. Le voile s'installe et des débris me tombent dessus. Je dois tirer la corde de bas en haut afin de poursuivre la descente. Ça y est, je touche le fond, -14 mètres debout. Du coté aval, le passage est impossible à cause de l'étroitesse et de nombreux ponts rocheux. Coté amont, pas mieux, mais là je m'y attendais.

         Cela fait 5 minutes que je grenouille et j'ai l'impression de m'être juste immergé. La remonté assistée par Archimède se déroule sans soucis. Avant de sortir, je regarde la partie amont mais sans m'y engager.

         Une fois changé, l'idée d'aller revoir les trois sources me traverse l'esprit. Comme j'ai remué beaucoup de sédiments, je vais pouvoir observer si les sources sont reliées au même réseau. La première, rien n'a changé, la seconde non plus, par contre la troisième est passée d'un joli bleu vert à un magnifique jaune orangé ! Donc, je peux affirmer sans trop me tromper l'inter connexion entre la diaclase et la fontaine 3. Pourtant, j'aurais juré que la fontaine 1 faisait partie du même réseau car elle se trouve dans l'axe direct de la diaclase.

        En conclusion, la partie plongée est terminée mais il reste quelques prospections et désobstructions à envisager afin de mieux cerner la complexité du ou des réseau(x) de cette vallée. Et encore merci à tous.

     

    PS : en 2011 je suis repassé voir et le lac était remis en service. Par le biais du responsable l’eau d’irrigation, j’ai appris que la réparation avait été faite comme je l’avais préconisé et non comme le voulait l’hydrogéologue. Espérons que cela tienne le coup !!

     

    DELPECH Thomas